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Date de création : 03.01.2012
Dernière mise à jour :
04.06.2014
28 articles
Mohamed Amani était assis sur un banc du jardin public de la cité des caféiers. Mille et une pensées de désespoir, de tristesse et d’aigreur l’occupaient. La tête baissée, les yeux fermés, il était là physiquement mais son esprit se pavanait dans un gouffre de galère et de folie chaque jour, plus vaste. Il n’entendait rien : ni les joueurs de Maracana et leurs supporters qui faisaient à eux seuls les bruits de 9 villages lors de fêtes de réjouissance, ni les vendeuses d’alloco, de gbozon et les vendeurs de pain aux brochettes de viande –laquelle ?-, ni les multiples passants avec leurs incessants allers-retours … ! Rien ! Mohamed était bien loin, tout seul dans son petit monde. Il s’en était créé un à force de se sentir excommunié de celui du commun des mortels. Il n’avait ni lèpre ni maladie incurable ou contagieuse, mais il avait un mal tout aussi répugnant : Mohamed était au chômage depuis maintenant 8 ans ! 8 ans ! 8 ans de sa vie sans un emploi stable à la hauteur de son diplôme ! Toujours rien ! Pendant 8 ans, rien ! « Je suis un maudit ! Je suis un maudit ! » ! Il n’arrêtait pas de prononcer cette phrase, intérieurement et à haute voix par moments ! 8 ans sans le moindre emploi!
Sa paire de souliers baillait comme le crocodile de Lacoste et n’avait plus de semelles ! Ses chaussettes perforées telle une passoire tentaient de remplacer lesdites semelles décédées depuis plus de 3 ans. Son « Jean », enfin le morceau de tissu en forme de pantalon que la Vie avait rendu culotte ne couvrait plus qu’une moitié de ses membres inférieurs : il n’existait plus que de nom ; il était littéralement délavé et largement amorti. Sa cuisse gauche était exposée aux humeurs de la météo. Pareil pour son postérieur, ce qui laissait entrevoir une crasseuse paire de fesses. Son T-shirt criait haut et fort et à qui voulait l’entendre son envie de prendre sa retraite qui d’ailleurs, serait plus que méritée. Lorsqu’il l’achetait, ce tricot, un « body » comme dirait l’autre, était d’un noir éclatant ... Ce tricot avait maintenant un cou en forme de bateau à force d’être lavé, en plus d’être parsemé d’énormes trous ! Son beau noir avait été remplacé par un arc-en-ciel de taches de diverses origines. Paix à son âme… Ses cheveux ne restaient pas à l’écart devant le répugnant aspect physique de Mohamed. Sans méchanceté aucune, les jeunes assis pas loin de lui, s’entendaient pour dire qu’ils devraient être une forêt classée tant ils étaient broussailleux et inspiraient la peur. Ils présentaient des taches de rousseur devant le soleil et dégageaient la même odeur que 2 cabris réunis… Son inconditionnelle mallette dont il prenait soin comme une mère poule de ses petits, était comme d’habitude à coté de lui ! Il l’ouvrait de temps à autre, en sortait quelques feuilles, les fixait, les déchirait parfois, les présentait à quiconque était habillé en costume … Il était assis, calebasse devant lui. Mohamed était assis. Tel un zombie.
Il se revoyait, lui qu’on croyait maudit, après 5 précédents échecs obtenir finalement son baccalauréat série D avec la mention Passable au Lycée Municipal de Djanpankro. Ce qui lui valut une place au sein de la Faculté des Sciences Economiques et de Gestion de la prestigieuse Université de Cocody. Il abandonna son Djanpankro natal et vint pour la première fois de sa vie à Abidjan avec toutes les bénédictions de sa mère, son père, ses tantes, ses oncles, bref tout le village qui était visiblement surpris de voir ce « maudit » sur la route du succès ! Il débarqua donc à Abidjan, à “Petit Paris” comme on le disait à Djanpankro ! Abidjan ! C’est à Devant rail, à Abobo chez son oncle qu’il logeait. Enfin chez le cousin du cousin d’un ami d’enfance de son père. Il n’avait aucune autre connaissance à Abidjan et de toute façon, il devait bénéficier d’une chambre d’étudiant et de plein d’autres avantages comme son père Amani Gustave-Paulin, cheminot à la retraite, le lui avait dit en lui remettant un unique billet de 5000F en plus de son transport. Pour lui, son séjour chez son oncle n’allait durer que 10 jours tout au plus ! Et c’est exactement, ce qui se passa. Passé le 10ème jour, son “oncle” le chassa de la maison, un entrer-coucher. Il l’accusait de vol, le traitait paresseux, d’être trop proche de sa fille ainée, de durer trop longtemps dans la douche, de ceci, de cela…! Le voici donc livré à la rue, à son destin et à lui-même ! Il parvint non sans immenses efforts à se retrouver au Campus et pour la somme de 2000 francs par mois, il put obtenir la permission de dormir avec 5 autres personnes dans une chambre de 3 m² ! Galère après galère, il obtint son Deug, sa licence et enfin sa maitrise. S’il avait survécu jusque là, c’était grâce à la bourse dont il bénéficiait. 8 ans après, il obtint sa maitrise, l’instabilité du pays et l’éternelle crise de l’Université publique doublées de ses résultats brillamment passables lui avait chacune valu plusieurs années de retard ! Mais peu importe ! Maitrise en économie en poche, il disait déjà au revoir à toute une existence de galère !! Mohamed, maitrisard, allait vivre une nouvelle vie ! Enfin, c’est ce que son tag laissé sur la clôture du Campus exprimait : « Le maudit va percer » ! -Tag, qui lui valu son exclusion du Campus !- Mohamed, maitrise en poche et à la rue allait effectivement vivre une nouvelle vie ! Un ami qui gérait une photocopieuse devant la cité lui avait permis de dormir dans son magasin.
Ce furent exactement 49 demandes d’emplois infructueuses car sans réponse que Momo avait déposées dans les entreprises de la place ! La cinquantième eu un retour : un entretien avec le DRH ! Il emprunta de l’argent à des connaissances pour s’acheter de nouveaux vêtements : un Jean, un tricot et une paire de souliers. L’entreprise était située à Angré les caféiers. C’était un cabinet de gestion d’entreprise. Ou quelque chose comme ça. Son rendez-vous dura une heure ! Au menu, cours de français car ses lettres de motivation et curriculum vitae avaient le bonheur de regorger de 21 fautes pour l’une et 14 pour l’autre ; ce fut ensuite une série de questions sur l’actualité du pays : il reçut chacune des questions comme une balle à la tête car de l’actualité de pays, il n’en savait royalement RIEN n’ayant ni télé, ni radio ni autre moyen de s’informer à part la titrologie! Enfin, ce furent des reproches concernant la façon dont il était habillé : « Entreprise ! Pour un entretien d’embauche ! C’est quoi cette tenue ? On aurait dit que vous allez à Tempo ! » ! C’en était trop ! Mohamed, en avait jusque là ! Larmes aux yeux, il se leva et sortit du bureau ! Une fois à l’extérieur du bâtiment, il poussa un cri de douleur, se mit ensuite à rire à gorge déployée, et pleura ensuite toutes les larmes de don corps sous le regard tantôt compatissant tantôt amusé des habitants de la cité des Caféiers ! Il criait : « JE SUIS UN MAUDIT » ! Il y resta et reçut le titre de fou du quartier ! Quand on lui demandait son nom, il disait s’appeler Le maudit. Il ne retourna plus jamais au Campus ! N’ayant pas d’argent et profitant de ce titre de fou, il n’hésitait pas à manger dans les poubelles de ces gens aisés et à dormir à la belle étoile au jardin ! Pour tout le monde, c’était un malade ! Son chômage était incurable en effet ! 8 ans ! 8 ans de chômage ! Sans famille ! Sans travail ! Fou ! Pendant 8 ans maintenant ! Il était pourtant très lucide mais se cachait derrière cette folie pour survivre ! 8 ans maintenant ! Mendiant de temps à autres, il menait plutôt « bien » sa vie ! C’était un fou polyvalent comme le disaient les jeunes du quartier !
Mohamed était assis. Il était 14h. Il avait devant lui une petite calebasse, son outil de travail de mendiant ; à coté de lui, sa mallette. Il était assis. Depuis une énorme cylindrée, un fils du quartier, devenu brouteur depuis peu, lui lança un craquant billet de 1000 FCFA avant de l’intoxiquer avec la fumée de son insolent bolide ! Il y avait vraiment un Dieu pour les fous ! 1000FCFA ! Il courut vers la vendeuse d’alloco qui l’accueillit avec un caillou ! Et ce fut comme ça chez tous les vendeurs. Il ne pouvait s’acheter de la nourriture vu qu’il était fou, selon eux ! Il pourrait faire fuir la clientèle ! 1000 F en main, il ne savait que faire ! 1000 F ! Cela faisait si longtemps qu’il n’avait pas touché ce billet qui avait changé de forme et de couleur depuis. Il avait faim mais ne pouvait se nourrir comme il le voulait.
Et voilà que, inspiré par on ne sait quelle prophétie, Mohamed se dirigea à toute vitesse vers un point agréé LONA (LOterie NAtionale) et acheta un ticket de Pote’Jack ! Il était surpris qu’on accepte de le servir mais bon tant mieux ! Il gratta la surface grise du ticket ! Il vit d’abord une somme de six cents francs sortir, puis un Jack. Il continua ; découvrit un Joke puis un autre Joke. Il murmurait, râlait «Joke, Joke ce n’est que de la plaisanterie ce truc», se souvenant du mot anglais Joke qui veut dire plaisanterie! Il continuait quand même ! Il vit un Jack ! Encore six cents francs ! Ensuite un Joke ! Une case vide ! Et un Jack ! 3 JOKES, 3 JACKS, 2 FOIS « SIX CENTS FRANCS » ET UNE CASE VIDE ! Déçu, notre fou, espérant voir s’afficher 3 fois « 10 000 000 », jeta le ticket dans le caniveau juste à coté en s’écriant : « Je suis vraiment maudit! » ! Il retourna à son poste de mendiant et fou ! Il pensait jouer au jeu Millionnaire célèbre à l’époque !
Et pourtant ! C’était le Jeu Pote’Jack ! Il fallait obtenir 3 Jacks qui signifiaient « un passage à la télé pour un relooking de ta vie » ! Mais ça, Mohamed Amani ne le savait pas… C’était un maudit !
mimi ton histoire :)Waaoouh ! Coe quoi il est vraiment Fou ! il ne sait pas ce qu'il a ratéToi meme tu saiseeeeeeeeeeeh c'est triste ... pffffCool un pur régal!^^C'est très bien écritcoooooool c vrmen coool je kiff grav tn style décriture, t idéées et tt le rste... kntinu kmsaJ'aime trop Méli!!!!c'est la vie qui la rendu comme xa!!lol!!!!!! bien ecrit ma fillehttp://melisenmele.centerblog.net
l'enfant la est maudit :Ohttp://heliicaa.centerblog.net
Cette histoire est vraiment triste, mais à bien regarder elle est met a nu ce terrible fléau qui mine notre société: le chômage.Très bel article Meli ^^
On en redemande.
super bien écrit ! mais le gars fait pitié comme ça ... s'il avait accès à la tv au campus, il aurait connu le mode d'emploi de Pote'Jack ...Merci merci :). C'est peut être triste mais bon, c'est la triste réalité.http://melisenmele.centerblog.net
Super textetrès touchante l'histoire bel narration et triste réalité du pays tous les fous qui sont dans nos rues à abidjan ne sont pas réelement fou mais victime de la galèr en france on les apel clochardoui oui rien à dire tu est vraiment talentueuse surtout la fin où on s'attend plus au classique retournement de situation et là tu surprend avec la confirmation je suis fan.Melissa l histoire fait trop pitié !!! ?( ?trop tristeEcrire un commentaire